Politique, jeux et science de l’âme
Au temps de Platon, les sophistes sont des professeurs itinérants de l’enseignement supérieur. Ils donnent, contre rétribution, aux fils de l’aristocratie, des cours sur l’art de parler et de persuader, sur l’art de manipuler les masses. Dans Le Sophiste, Platon dresse un sévère réquisitoire contre eux, les qualifiant d’athlètes en paroles et d’illusionnistes. Vers –385, il crée l’Académie, où « Nul ne pénètre s’il n’est géomètre », et où sont enseignées notamment les mathématiques, les sciences naturelles, l’astronomie, les sciences politiques et la philosophie. La pédagogie du dialogue y est pratiquée.
Aujourd’hui, comment les « athlètes en paroles » modernes opèrent-ils ? Par l’intermédiaire du petit écran, ils touchent des millions de personnes, et leur donnent l’illusion de parler de politique. En fait, dans les émissions d’infotainment (expression forgée avec information et entertainment), ils ne parlent pas d’idées, mais d’eux-mêmes, d’impressions, de sentiments. Le discours émotionnel l’emporte alors sur le discours politique .
L’émotion est également au cœur des manifestations sportives, notamment footballistiques. Ces grands rassemblements, communautés imaginées autour d’un même enjeu, illustrent la recherche d’une cohésion perdue. Cohésion que n’offre plus le discours politique ? Panem et circenses (du pain et des jeux) était, selon Juvénal, poète satirique latin (fin du Ier – début du IIe siècle), tout ce que demandait le peuple. Si les jeux ont été inventés par les Grecs, c’est à Rome qu’est né le sport-spectacle et que le rôle de l’argent dans les compétitions s’est affirmé. Le grand cirque de Rome contenait jusqu’à 150 000 personnes. Les organisations étaient structurées, et les « partis sportifs » se distinguaient par leurs couleurs : les Bleus, les Verts, les Blancs et les Rouges ! Aujourd’hui, les psychologues s’intéressent aux rencontres de football, au comportement des footballeurs, à celui des spectateurs dans les stades ou devant leur téléviseur.
Se rassembler, vibrer pour un objectif commun, s’inquiéter face à l’incertitude du résultat, le sport renforce la cohésion du groupe . Une foule qui écoute un discours politique, ou qui regarde un match de football, ressemble parfois à une sorte de « supra-individu » réagissant « comme un seul homme ». Un tel comportement de masse laisse penser qu’il existe un inconscient collectif qui animerait les foules, lesquelles seraient plus que la somme de leurs constituants, et laisseraient émerger des propriétés nouvelles. Cet inconscient collectif présente certaines caractéristiques de l’inconscient cognitif, notamment une forte charge émotionnelle.
Les neurosciences et la psychanalyse peuvent-elles dialoguer ? Nombre de psychanalystes refusent ce dialogue, et certains neuroscientifiques le trouvent sinon impossible du moins stérile. La psychanalyse est accusée de tous les maux, et l’on reproche aux neurosciences de vouloir réduire l’individu à ses neurones. Tous ne campent pas sur des positions aussi tranchées et une nouvelle discipline, la neuropsychanalyse, a même vu le jour. La science de l’âme – la psychologie selon Platon – a tout à gagner d’un dialogue éclairé.
source: Françoise Pétry - http://www.cerveauetpsycho.com/
Aujourd’hui, comment les « athlètes en paroles » modernes opèrent-ils ? Par l’intermédiaire du petit écran, ils touchent des millions de personnes, et leur donnent l’illusion de parler de politique. En fait, dans les émissions d’infotainment (expression forgée avec information et entertainment), ils ne parlent pas d’idées, mais d’eux-mêmes, d’impressions, de sentiments. Le discours émotionnel l’emporte alors sur le discours politique .
L’émotion est également au cœur des manifestations sportives, notamment footballistiques. Ces grands rassemblements, communautés imaginées autour d’un même enjeu, illustrent la recherche d’une cohésion perdue. Cohésion que n’offre plus le discours politique ? Panem et circenses (du pain et des jeux) était, selon Juvénal, poète satirique latin (fin du Ier – début du IIe siècle), tout ce que demandait le peuple. Si les jeux ont été inventés par les Grecs, c’est à Rome qu’est né le sport-spectacle et que le rôle de l’argent dans les compétitions s’est affirmé. Le grand cirque de Rome contenait jusqu’à 150 000 personnes. Les organisations étaient structurées, et les « partis sportifs » se distinguaient par leurs couleurs : les Bleus, les Verts, les Blancs et les Rouges ! Aujourd’hui, les psychologues s’intéressent aux rencontres de football, au comportement des footballeurs, à celui des spectateurs dans les stades ou devant leur téléviseur.
Se rassembler, vibrer pour un objectif commun, s’inquiéter face à l’incertitude du résultat, le sport renforce la cohésion du groupe . Une foule qui écoute un discours politique, ou qui regarde un match de football, ressemble parfois à une sorte de « supra-individu » réagissant « comme un seul homme ». Un tel comportement de masse laisse penser qu’il existe un inconscient collectif qui animerait les foules, lesquelles seraient plus que la somme de leurs constituants, et laisseraient émerger des propriétés nouvelles. Cet inconscient collectif présente certaines caractéristiques de l’inconscient cognitif, notamment une forte charge émotionnelle.
Les neurosciences et la psychanalyse peuvent-elles dialoguer ? Nombre de psychanalystes refusent ce dialogue, et certains neuroscientifiques le trouvent sinon impossible du moins stérile. La psychanalyse est accusée de tous les maux, et l’on reproche aux neurosciences de vouloir réduire l’individu à ses neurones. Tous ne campent pas sur des positions aussi tranchées et une nouvelle discipline, la neuropsychanalyse, a même vu le jour. La science de l’âme – la psychologie selon Platon – a tout à gagner d’un dialogue éclairé.
source: Françoise Pétry - http://www.cerveauetpsycho.com/
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