Pas ce soir, chérie, je préfère le robot
Andy (mensurations : 101-56-86) a ce dont beaucoup d’hommes rêvent chez une femme : “Une patience infinie”. C’est du moins ce qu’assure son fabricant, First Androids. Andy offre en outre différentes options, dont un “système de fellation à intensité variable”, un “pouls perceptible”, des “hanches à rotation” et un “chauffage avec variateur” pour élever la température du corps. Seuls les pieds “restent froids, comme dans la réalité”, précise David Levy. L’attrait que le chercheur britannique éprouve pour Andy est purement scientifique, assure-t-il. Pour lui, cette poupée sexuelle high-tech n’est rien de moins que le présage d’un nouvel ordre mondial.
Expert en intelligence artificielle, David Levy vient de publier Love and Sex with Robots : The Evolution of Human-Robot Relationships (Amour et sexe avec les robots : l’évolution des rapports hommes-robots). Sa conviction ? D’ici quarante ans à peine, êtres humains et robots s’accoupleront. Les humanoïdes nous enseigneront des pratiques sexuelles que nous n’aurions jamais imaginées ; nous les aimerons et les respecterons, et nous leur confierons nos secrets les plus intimes. A la vitesse où évoluent les technologies, les machines présenteront bientôt des traits humains, et l’union hommes-robots deviendra une pratique courante, assure-t-il.
Le succès d’Aibo, le chien robot de Sony, et de Furby, robot jouet aux airs de boule de poils améliorée avec circuit intégré, montre que la technologie peut servir de caisse de résonance aux émotions de l’être humain. “Il n’est pas rare que les gens s’attachent à leur animal de compagnie virtuel, y compris à un animal robot, explique Levy. Il n’y aurait donc rien d’étonnant à ce que l’homme s’attache aussi fortement à des humanoïdes.”
En matière de rapports sexuels, les robots pourront bientôt supplanter la chair, estime-t-il. Le chercheur a passé au crible l’histoire des accessoires érotiques et rassemblé des documents attestant la lointaine existence de vibromasseurs fonctionnant grâce à des machines à vapeur et des mécanismes d’horlogerie. David Levy décrit également un appareil de masturbation pour femmes, à pédales, inventé en 1926 en Allemagne par des ingénieurs de Leipzig. Dans une anthologie pornographique japonaise de la fin du XVIIe siècle, l’auteur parle quant à lui d’un “oreiller de voyage lascif”. On connaît également la vulve artificielle, appelée en japonais azugamata (substitut de femme), fabriquée en carapace de tortue et dont l’orifice était doublé de satin.
Dans leurs périples autour du monde, les marins néerlandais emmenaient des poupées de cuir cousues main ; aujourd’hui, les poupées sexuelles ne sont plus en cuir, mais au Japon on les nomme toujours “épouses hollandaises”. La société nippone Orient Industry vend ainsi des poupées hyperréalistes qui sont des répliques quasi parfaites de jeunes Japonaises, jusqu’aux cheveux et à la texture de la peau. Elle doit son succès à un modèle plus ancien, l’Antarctica, une créature qui tenait chaud aux scientifiques passant les longs hivers polaires à la base de Showa, en Antarctique.
Aux Etats-Unis, la société RealDoll, numéro un du marché de la poupée réaliste, vend 6 500 dollars pièce ses modèles Leah et Stephanie, dotés de trois “portes du plaisir”. Simples sex toys conçus pour tirer un coup vite fait ? Pas du tout, assure Hideo Tsuchiya, président d’Orient Industry. “L’‘épouse hollandaise’ n’est pas une simple poupée, ni un objet : elle peut être une amante irremplaçable, apportant un vrai réconfort affectif.”
Dans quelques années, les humanoïdes ressembleront-ils tellement à l’homme qu’ils pourront faire office de partenaires, voire remplacer avantageusement l’être humain ? A priori, l’apparence ne pose pas de problème. En 2005, l’expert japonais en robotique Hiroshi Ishiguro dévoilait son robot Repliee Q1 : grâce à 42 mécanismes à air comprimé, cette gynoïde (humanoïde de sexe féminin) “bouge et réagit de façon très humaine, commente, enthousiaste, David Levy. Repliee Q1 bat des cils et paraît respirer. Elle bouge les mains comme un être humain, réagit quand on la touche, etc.”
Mais il y a bien plus difficile que donner à ces robots une apparence humaine : leur insuffler quelque chose proche d’une âme. On achoppe aujourd’hui sur les aspects les plus essentiels du comportement humain. Les capteurs robotiques actuels sont incapables de faire le distinguo entre deux individus, souligne David Levy. Or un robot qui ne reconnaît pas son partenaire ou le confond avec quelqu’un d’autre, c’est une relation vouée à l’échec, reconnaît le chercheur britannique.
Mais les progrès seront rapides, assure-t-il. Pour lui, douer les robots de sentiments humains tels que l’empathie, l’humour, la compréhension et l’amour n’est guère qu’un problème technologique. L’empathie, par exemple, “se résume essentiellement à un apprentissage”. Elle est donc “relativement facile à appliquer aux robots”. Tout ce que la machine doit faire, c’est observer son partenaire, formuler des hypothèses intelligentes sur ses émotions et réagir en conséquence.
David Levy entrevoit un avenir dans lequel l’intelligence artificielle permettra aux robots d’agir comme s’ils avaient expérimenté tous les possibles du vécu humain, sans que ce soit véritablement le cas. Il prend l’exemple des émotions. “Si un robot se comporte comme s’il avait des sentiments, qu’est-ce qui nous permettra de dire qu’il n’en a pas ? demande-t-il. Si les émotions artificielles d’un robot l’incitent à dire des mots comme ‘Je t’aime’, pourquoi ne le croirait-on pas si ses autres schémas comportementaux corroborent ses dires ?”
Selon Levy, les androïdes présentent des atouts notables par rapport aux partenaires en chair et en os. Infidélité, mauvaise humeur, mauvaise haleine, manque d’hygiène, obsession maladive pour le foot : autant de travers relégués aux oubliettes de l’Histoire. Sans compter que le compagnon robot serait immortel. On pourra même sauvegarder la personnalité des robots sur disque dur : si le robot est détruit, il sera facile de le ressusciter.
Et le sexe ! Des partenaires toujours partants, jamais déçus, sans la moindre migraine – et avec les fantasmes les plus cochons à télécharger. Le robot pourrait être programmé pour proposer “les positions et techniques sexuelles du monde entier” ou être mis “en ‘mode apprentissage’ pour les novices du sexe”. Des dimensions du vagin à la taille du pénis, en passant par les odeurs corporelles et les poils, tout serait réglable.
“Imaginez un monde dans lequel les robots seront (presque) nos semblables, lance David Levy. Cela aura de considérables répercussions sociales.” Le chercheur évoque aussi les questions morales et éthiques qui surgiront après la grande invasion humanoïde. Sera-t-il immoral de prêter son robot de plaisir à des amis ou d’“utiliser le sexbot d’un ami sans le lui dire” ? Sera-t-il acceptable de tromper un androïde ? Que fera un mari en s’entendant dire par sa chère et tendre : “Pas ce soir, chéri, je préfère le robot” ?
David Levy est persuadé que, passé les premières réticences, les femmes seront ravies de remplacer leur époux transpirant par un robot. Car les médiocres performances sexuelles de beaucoup d’hommes comblent mal l’appétit sexuel de ces dames, affirme Levy, qui cite pour preuve “les ventes colossales” de vibromasseurs.
Et les hommes, alors ? Ils sont d’ores et déjà disposés à “faire l’amour avec des poupées gonflables”, constate Henrik Christensen, coordinateur de l’European Robotics Research Network. “Tout ce qui sera doué de mouvement représentera un progrès.”
Source: Courrier International
Expert en intelligence artificielle, David Levy vient de publier Love and Sex with Robots : The Evolution of Human-Robot Relationships (Amour et sexe avec les robots : l’évolution des rapports hommes-robots). Sa conviction ? D’ici quarante ans à peine, êtres humains et robots s’accoupleront. Les humanoïdes nous enseigneront des pratiques sexuelles que nous n’aurions jamais imaginées ; nous les aimerons et les respecterons, et nous leur confierons nos secrets les plus intimes. A la vitesse où évoluent les technologies, les machines présenteront bientôt des traits humains, et l’union hommes-robots deviendra une pratique courante, assure-t-il.
Le succès d’Aibo, le chien robot de Sony, et de Furby, robot jouet aux airs de boule de poils améliorée avec circuit intégré, montre que la technologie peut servir de caisse de résonance aux émotions de l’être humain. “Il n’est pas rare que les gens s’attachent à leur animal de compagnie virtuel, y compris à un animal robot, explique Levy. Il n’y aurait donc rien d’étonnant à ce que l’homme s’attache aussi fortement à des humanoïdes.”
En matière de rapports sexuels, les robots pourront bientôt supplanter la chair, estime-t-il. Le chercheur a passé au crible l’histoire des accessoires érotiques et rassemblé des documents attestant la lointaine existence de vibromasseurs fonctionnant grâce à des machines à vapeur et des mécanismes d’horlogerie. David Levy décrit également un appareil de masturbation pour femmes, à pédales, inventé en 1926 en Allemagne par des ingénieurs de Leipzig. Dans une anthologie pornographique japonaise de la fin du XVIIe siècle, l’auteur parle quant à lui d’un “oreiller de voyage lascif”. On connaît également la vulve artificielle, appelée en japonais azugamata (substitut de femme), fabriquée en carapace de tortue et dont l’orifice était doublé de satin.
Dans leurs périples autour du monde, les marins néerlandais emmenaient des poupées de cuir cousues main ; aujourd’hui, les poupées sexuelles ne sont plus en cuir, mais au Japon on les nomme toujours “épouses hollandaises”. La société nippone Orient Industry vend ainsi des poupées hyperréalistes qui sont des répliques quasi parfaites de jeunes Japonaises, jusqu’aux cheveux et à la texture de la peau. Elle doit son succès à un modèle plus ancien, l’Antarctica, une créature qui tenait chaud aux scientifiques passant les longs hivers polaires à la base de Showa, en Antarctique.
Aux Etats-Unis, la société RealDoll, numéro un du marché de la poupée réaliste, vend 6 500 dollars pièce ses modèles Leah et Stephanie, dotés de trois “portes du plaisir”. Simples sex toys conçus pour tirer un coup vite fait ? Pas du tout, assure Hideo Tsuchiya, président d’Orient Industry. “L’‘épouse hollandaise’ n’est pas une simple poupée, ni un objet : elle peut être une amante irremplaçable, apportant un vrai réconfort affectif.”
Dans quelques années, les humanoïdes ressembleront-ils tellement à l’homme qu’ils pourront faire office de partenaires, voire remplacer avantageusement l’être humain ? A priori, l’apparence ne pose pas de problème. En 2005, l’expert japonais en robotique Hiroshi Ishiguro dévoilait son robot Repliee Q1 : grâce à 42 mécanismes à air comprimé, cette gynoïde (humanoïde de sexe féminin) “bouge et réagit de façon très humaine, commente, enthousiaste, David Levy. Repliee Q1 bat des cils et paraît respirer. Elle bouge les mains comme un être humain, réagit quand on la touche, etc.”
Mais il y a bien plus difficile que donner à ces robots une apparence humaine : leur insuffler quelque chose proche d’une âme. On achoppe aujourd’hui sur les aspects les plus essentiels du comportement humain. Les capteurs robotiques actuels sont incapables de faire le distinguo entre deux individus, souligne David Levy. Or un robot qui ne reconnaît pas son partenaire ou le confond avec quelqu’un d’autre, c’est une relation vouée à l’échec, reconnaît le chercheur britannique.
Mais les progrès seront rapides, assure-t-il. Pour lui, douer les robots de sentiments humains tels que l’empathie, l’humour, la compréhension et l’amour n’est guère qu’un problème technologique. L’empathie, par exemple, “se résume essentiellement à un apprentissage”. Elle est donc “relativement facile à appliquer aux robots”. Tout ce que la machine doit faire, c’est observer son partenaire, formuler des hypothèses intelligentes sur ses émotions et réagir en conséquence.
David Levy entrevoit un avenir dans lequel l’intelligence artificielle permettra aux robots d’agir comme s’ils avaient expérimenté tous les possibles du vécu humain, sans que ce soit véritablement le cas. Il prend l’exemple des émotions. “Si un robot se comporte comme s’il avait des sentiments, qu’est-ce qui nous permettra de dire qu’il n’en a pas ? demande-t-il. Si les émotions artificielles d’un robot l’incitent à dire des mots comme ‘Je t’aime’, pourquoi ne le croirait-on pas si ses autres schémas comportementaux corroborent ses dires ?”
Selon Levy, les androïdes présentent des atouts notables par rapport aux partenaires en chair et en os. Infidélité, mauvaise humeur, mauvaise haleine, manque d’hygiène, obsession maladive pour le foot : autant de travers relégués aux oubliettes de l’Histoire. Sans compter que le compagnon robot serait immortel. On pourra même sauvegarder la personnalité des robots sur disque dur : si le robot est détruit, il sera facile de le ressusciter.
Et le sexe ! Des partenaires toujours partants, jamais déçus, sans la moindre migraine – et avec les fantasmes les plus cochons à télécharger. Le robot pourrait être programmé pour proposer “les positions et techniques sexuelles du monde entier” ou être mis “en ‘mode apprentissage’ pour les novices du sexe”. Des dimensions du vagin à la taille du pénis, en passant par les odeurs corporelles et les poils, tout serait réglable.
“Imaginez un monde dans lequel les robots seront (presque) nos semblables, lance David Levy. Cela aura de considérables répercussions sociales.” Le chercheur évoque aussi les questions morales et éthiques qui surgiront après la grande invasion humanoïde. Sera-t-il immoral de prêter son robot de plaisir à des amis ou d’“utiliser le sexbot d’un ami sans le lui dire” ? Sera-t-il acceptable de tromper un androïde ? Que fera un mari en s’entendant dire par sa chère et tendre : “Pas ce soir, chéri, je préfère le robot” ?
David Levy est persuadé que, passé les premières réticences, les femmes seront ravies de remplacer leur époux transpirant par un robot. Car les médiocres performances sexuelles de beaucoup d’hommes comblent mal l’appétit sexuel de ces dames, affirme Levy, qui cite pour preuve “les ventes colossales” de vibromasseurs.
Et les hommes, alors ? Ils sont d’ores et déjà disposés à “faire l’amour avec des poupées gonflables”, constate Henrik Christensen, coordinateur de l’European Robotics Research Network. “Tout ce qui sera doué de mouvement représentera un progrès.”
Source: Courrier International
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