31.3.07

Dieu est finalement assez probable

Dans le monde postmoderne, il semble logique que Dieu n'existe pas. Cette hypothèse a beau reposer sur des bases aussi peu scientifiques que l'hypothèse contraire, elle n'en a pas moins trouvé au siècle dernier de fervents défenseurs. Les deux devraient logiquement avoir exactement les mêmes probabilités, soit 50 %. Or, à en croire un article paru dans le mensuel scientifique allemand PM Magazin, l'existence de Dieu est plus probable que l'inverse, chose qui en ces temps troublés en rassurera peut-être plus d'un.

Thomas Vasek, rédacteur en chef de la revue, s'est donc penché à son tour sur ce débat séculaire. Avant lui, au XVIIe siècle, le mathématicien et philosophe Blaise Pascal, avait conclu que, étant donné que Dieu peut aussi bien exister que ne pas exister, il n'y a qu'une solution: parier. Vasek, pour sa part, a décidé d'en avoir le coeur net en partant de la célèbre formule inventée il y a deux cent cinquante ans par le mathématicien anglais Thomas Bayes. Cette formule permet de calculer la probabilité d'un événement en fonction de la réalisation d'un autre dans un univers des possibles divisé en deux sous-ensembles ou plus. Cette méthode, destinée à déterminer la probabilité des causes d'un événement par les effets observés, constitue la base de la "technique bayésienne", très utilisée aujourd'hui en statistique.

Thomas Vasek s'est appuyé sur le livre du physicien Stephen D. Unwin The Probability of God : A Simple Calculation That Proves the Ultimate Truth (La probabilité de Dieu: un calcul simple qui prouve la vérité ultime.. Il est parti du principe qu'il y a 50% de chances que Dieu existe, ce qui revient à "ne rien savoir du tout", et a décomposé son univers d'étude en cinq champs d'indices. Le premier, "la naissance du cosmos", fait pencher la balance en faveur de Dieu et élève la probabilité de son existence à 67 %. Puisque l'état actuel des connaissances empêche de penser que quelque chose puisse surgir du néant, l'hypothèse que Dieu ait créé l'univers est donc "un peu plus plausible. Le deuxième champ d'indices, "l'ordre cosmique", joue également en faveur de Dieu, car l'étude des conditions physiques de l'univers montre qu'il suffirait de les changer d'un iota pour que celui-ci s'effondre et qu'un faisceau d'éléments donnent à penser que notre univers est "extrêmement improbable". Or il est toujours là, ce qui fait grimper la probabilité de l'existence de Dieu à 80 %. Le troisième champ d'indices, "l'évolution de la vie" sous toutes ses formes, met les chances d'une "autogenèse" à égalité avec celles d'une création, ce qui nous ramène à 50-50. Mais le quatrième indice, "l'existence du bien et du mal", porte un sérieux coup à Dieu. En effet, même si l'universalité de la notion de bien plaide pour la préexistence d'un Bien, celle-ci est contredite par l'abondance du mal sur terre, ce qui fait tomber la possibilité de Dieu à 45 %. Enfin, avec ses "expériences spirituelles", l'homme est paradoxalement l'événement qui vient sauver la mise à Dieu : deux mille cinq cents ans d'expérience humaine de la transcendance Lui donnent un avantage final de 62 %.

Même s'il corrige de 5 % à la baisse les calculs d'Unwin en 2005, ce résultat est supérieur aux 50 % du pari pascalien. Le philosophe et scientifique français était d'avis que, même si le plus raisonnable face à deux choses aussi possibles l'une que l'autre est de douter, une analyse approfondie montre que ceux qui font tout comme s'ils croyaient ont tout à gagner - qu'il y ait ou non une vie après la mort - et rien à perdre dans ce `jeu à somme nulle". Ceux qui décideraient de ne pas croire ont au contraire tout à perdre. Vasek, lui, conclut que, si "la raison ne peut rien nous dire de sûr concernant Dieu, il semble toutefois raisonnable de le faire entrer en ligne de compte".

Source: Ramiro Villapadierna - HS Courrier international